Obligation d’entretien d’un logement squatté
C’est une décision qui fait couler beaucoup d’encre. La proposition de loi du député Kasbarian visant à protéger les logements contre l’occupation illicite, a été validée par le Conseil Constitutionnel le 26 juillet 2023 et promulguée le 27 juillet 2023 (retrouvez le texte de loi ici).
Si cette loi, en faveur des propriétaires, adopte une série de mesures favorables à la lutte contre le squat et les impayés locatifs (voir notre article sur le sujet), un article de la proposition de loi a été jugé inconstitutionnel et censuré par le Conseil constitutionnel.
Le principe d’exonération de responsabilité proposé
L’article 7 de la proposition de loi prévoyait de créer un article dans le code civil afin de libérer le propriétaire d’un bien immobilier occupé illicitement, de son obligation d’entretien et de l’exonérer de sa responsabilité en cas de dommage résultant d’un défaut d’entretien de ce bien. Il était alors prévu que « lorsque le bien immobilier est occupé illicitement, le propriétaire ne peut pas être tenu pour responsable du dommage résultant d’un défaut d’entretien pendant cette période d’occupation et que, en cas de dommage causé à un tiers, la responsabilité en incombe à l’occupant sans droit ni titre. »
Cette proposition est jugé inconstitutionnelle au motif que dans la proposition de loi qui était faite « le propriétaire bénéficie de cette exonération sans avoir à démontrer que le comportement de cet occupant a fait obstacle à la réalisation des travaux de réparation nécessaires. »
Le principe de l’obligation d’entretien d’un logement squatté retenu
De plus, le Conseil constitutionnel explique que « les dispositions contestées prévoient que le propriétaire est exonéré de sa responsabilité non seulement à l’égard de l’occupant sans droit ni titre, mais également à l’égard des tiers. Ainsi, alors que ce régime de responsabilité de plein droit a pour objet de faciliter l’indemnisation des victimes, les tiers ne peuvent, dans ce cas, exercer une action aux fins d’obtenir réparation de leur préjudice qu’à l’encontre du seul occupant sans droit ni titre, dont l’identité n’est pas nécessairement établie et qui ne présente pas les mêmes garanties que le propriétaire, notamment en matière d’assurance. » Ainsi, cette proposition est également retoquée pour des questions d’assurance vis à vis des tiers.
Ainsi c’est le principe de l’exonération totale de la responsabilité du propriétaire qui est rejetée par le Conseil constitutionnel. Le propriétaire pourra assurément être exempté de toute responsabilité en cas de survenance d’un dommage à l’occupant ou à un tiers en démontrant qu’il a été empêché d’agir (accès rendu impossible ou refusé par les squatteurs par exemple).
Une obligation d’entretien également retenu pour un locataire qui ne paye pas le loyer
Dans une affaire récente, la Cour de cassation a eu à connaitre d’un cas similaire. Un propriétaire a donné en location un appartenant à un locataire. Le locataire a chuté au sol depuis la fenêtre de la cuisine du bien loué, à la suite de la rupture du garde-corps. Il a engagé la responsabilité du propriétaire pour le défaut d’entretien du bien donné en location. Toutefois la situation était particulière car en raison de loyers impayés, le bail avait été résilié par le Tribunal avant la survenance de la chute.
La Cour de cassation a donc été amenée à trancher la question de savoir si le propriétaire est tenu d’entretenir le bien donné en location alors que le locataire en titre est devenu occupant sans droit ni titre suite à la résiliation judiciaire du bail.
Dans un arrêt en date du du 15 septembre 2022, la Cour répond que « l’occupation sans droit ni titre d’un bien immobilier par la victime ne peut constituer une faute de nature à exonérer le propriétaire du bâtiment au titre de sa responsabilité, lorsqu’il est établi que l’accident subi par cette dernière résulte du défaut d’entretien de l’immeuble. » Ainsi, elle confirme que le propriétaire est tenu de procéder aux obligations d’entretien qui lui incombent.